Lors de la fusion d’EPCI, la question de l’évaluation des compétences et des charges transférées se pose régulièrement. Les périmètres de compétences étant rarement similaires, pourquoi n’évaluerait-on une compétence que sur 1 EPCI ? Si un EPCI avait la compétence scolaire et l’autre non, doit-on évaluer les charges transférées pour cette compétence pour tout le territoire ou seulement les communes membres de l’EPCI qui n’était pas compétent ?
Les attributions de compensation, au coeur de la fiscalité professionnelle unique (FPU), sont un flux financier EPCI – communes membres qui permet de neutraliser budgétairement le transfert de charges et de recettes des communes membres vers l’EPCI. Elle sont les garantes de cette neutralité budgétaire du passage en fiscalité professionnelle unique ou des transferts de charges, au moment du transfert.
Les évaluations des transferts de charges ne peuvent donc porter que sur les charges transférées des budgets communaux vers le budget communautaire. En particulier, elles ne peuvent porter sur des charges qui étaient intercommunales (avant la fusion ou avant le passage en FPU) et qui le sont toujours. L’article 1609 nonies C du CGI stipule que l’évaluation doit se faire d’après leur coût réel « dans les budgets communaux ».
[citation alignement=”left”]Les évaluations de charges ne peuvent porter sur des charges qui étaient intercommunales[/citation]Si les charges intercommunales étaient retenues sur les attributions de compensations des communes, alors que ces dernières n’avaient pas ces dépenses dans leur budget, le principe de neutralité budgétaire des transferts serait rompu.
Historiquement, l’évaluation des charges intercommunales était réalisé jusqu’à la suppression de la taxe professionnelle. En effet, à cette époque, lors du passage en fiscalité professionnelle unique, les taux additionnels ménages étaient restitués aux communes. En contrepartie, on leur prélevait sur leurs attributions de compensation les dépenses de l’EPCI à fiscalité additionnelle. Avec la suppression de la taxe professionnelle, le passage en FPU ne s’accompagne plus de la restitution de la fiscalité additionnelle ménages. Dès lors, les charges intercommunales ne sont plus prises en compte puisque les communes n’ont pas les ressources pour les financer. Le législateur a donc revu l’article 1609 nonies C du CGI afin de supprimer le transfert des taxes additionnelles aux communes, et l’évaluation des charges intercommunales.
Ainsi, le 5° du V de l’article 1609 nonies C du CGI précise :
« L’attribution de compensation versée chaque année aux communes membres qui étaient antérieurement membres d’un établissement public de coopération intercommunale ne faisant pas application des dispositions du présent article est calculée conformément au 2°. Lorsque la fusion s’accompagne d’un transfert ou d’une restitution de compétences, cette attribution de compensation est respectivement diminuée ou majorée du montant net des charges transférées calculé dans les conditions définies au IV. »
Il faut donc que la fusion s’accompagne d’un transfert de compétence pour que l’attribution de compensation soit diminuée des charges transférées. En termes de méthode d’évaluation, le IV de l’article 1609 nonies C du code général des impôts précise :
« […]
Les dépenses de fonctionnement, non liées à un équipement, sont évaluées d’après leur coût réel dans les budgets communaux lors de l’exercice précédant le transfert de compétences ou d’après leur coût réel dans les comptes administratifs des exercices précédant ce transfert. Dans ce dernier cas, la période de référence est déterminée par la commission.
Le coût des dépenses liées à des équipements concernant les compétences transférées est calculé sur la base d’un coût moyen annualisé. Ce coût intègre le coût de réalisation ou d’acquisition de l’équipement ou, en tant que de besoin, son coût de renouvellement. Il intègre également les charges financières et les dépenses d’entretien. L’ensemble de ces dépenses est pris en compte pour une durée normale d’utilisation et ramené à une seule année. Le coût des dépenses transférées est réduit, le cas échéant, des ressources afférentes à ces charges. […] ».
Les dépenses de fonctionnement sont évaluées « d’après leur coût réel dans les budgets communaux lors de l’exercice précédant le transfert de compétences ou d’après leur coût réel dans les comptes administratifs des exercices précédant ce transfert. Dans ce dernier cas, la période de référence est déterminée par la commission».
Pour les investissements, l’article se réfère à un coût moyen annualisé.
Une certaine latitude semble donc laissée à la commission locale d’évaluation sur le plan méthodologique. Ainsi :
- Le coût des dépenses de fonctionnement est « évalué », il ne s’agit donc pas d’un simple calcul « automatique »,
- Le coût est évalué « d’après » leur coût réel, la commission doit donc proposer une méthode d’évaluation, tenant compte des coûts passés, mais pouvant intégrer d’autres paramètres.
- La loi dit « dans les budgets communaux » et non « dans chaque budget communal ». La commission peut donc proposer de retenir des coûts moyens et les appliquer à chacun.
Au final, le rôle de la commission locale est double :
- Élaborer une méthode d’évaluation des transferts de charges qui dépasse l’exercice concerné (méthode permanente) et transmettre ses conclusions aux conseils municipaux qui ont seuls le pouvoir délibérant.
- Être un observatoire permanent de l’évaluation des charges transférées pouvant proposer une actualisation des transferts initiaux, notamment par réduction volontaire des attributions de compensation à l’unanimité des conseils municipaux.