Le rapport 2022 sur la situation des finances des collectivités locales et de leurs établissements publics, anticipe sur le retour de la participation du secteur public local au redressement des comptes de la Nation.

Deux points sont à souligner, outre l’appréciation sur la bonne santé des collectivités locales qui laisse songeur.

Premier paragraphe, page 61 du rapport : l’auto-assurance des recettes.

Il [le constat de la bonne santé financière des collectivités locales par la Cour des Comptes] invite également les collectivités locales, dont les récentes réformes fiscales ont accentué la sensibilité à la conjoncture économique, à s’organiser pour faire face aux futurs aléas, à travers l’instauration de mécanismes d’auto-assurance.”

Ce principe évoqué “d’auto-assurance” (individuel ou collectif ?) correspond à la mise en réserve des excédents de recettes par rapport aux prévisions sur quelques recettes fiscales, comme cela est actuellement possible pour les droits de mutation à titre onéreux des départements.

De là à sentir poindre la tentation d’instituer un tel mécanisme pour la quote-part de TVA des intercommunalités, départements et régions, il n’y a qu’un pas. Quelle différence avec la transformation de cette recette en dotation ? A priori, un effet de cliquet à la hausse (la “mise en réserve” des bonnes nouvelles sur la progression de la recette), mais pas à la baisse (une fois épuisé les volumes en réserve).

Paragraphes 2 à 5, page 61 du rapport : la contribution à l’effort de redressement.

Enfin, alors qu’une nouvelle loi de programmation est attendue à l’automne, le principe d’une contribution du secteur public local au redressement des finances publiques apparaît légitime au regard des situations financières respectives des administrations publiques.
Dans cette hypothèse, plusieurs leviers d’inégale portée seraient théoriquement disponibles : l’encadrement du rythme d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement ; le recours à un critère fondé sur l’autofinancement ; la fixation d’un ratio d’endettement ; la définition d’un objectif d’évolution du besoin annuel de financement ; la réduction programmée dans le temps de certaines recettes.
Le choix de la reconduction d’un objectif d’encadrement des dépenses de fonctionnement impliquerait de lever les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des contrats de Cahors, dans un contexte différent de celui qui prévalait en 2017 (augmentation de la dépendance des recettes à la conjoncture, risque inflationniste élevé et hétérogène, etc.). Un critère fondé sur l’autofinancement pourrait faciliter la prise en compte de la diversité des modes de gestion locaux mais devrait être associé à une trajectoire pluriannuelle de recettes de manière à neutraliser les effets de cycle économique.
Les modalités de cette contribution s’inscriront dans un contexte économique incertain, caractérisé en particulier par un niveau d’inflation élevé. Sa prise en compte implique de déterminer son incidence nette sur les finances locales, sans se limiter aux seuls surcoûts.
“.

La Cour des comptes relève plusieurs outils pour faire participer les collectivités à l’effort de redressement des comptes de la Nation, dont il faut le rappeler, elles sont faiblement contributrices, compte tenu de leur obligation d’équilibre de leurs comptes. Il s’agit donc de trouver un mécanisme pour ponctionner les collectivités, puisque malgré les diminutions de recettes (TP, DGF, …), elles sont toujours en bonne situation financière. La cour cite ainsi quatre mesures dont les trois premières sont déjà connues ou expérimentées :

  • Un objectif d’encadrement des dépenses,
  • Un objectif d’évolution du besoin annuel de financement (ou comment “inciter” les collectivités à se désendetter pour compenser la hausse de l’endettement de l’Etat, car rappelons-le le déficit public, c’est la mesure de l’accroissement de l’encours de la dette, lire ici pour plus d’information),
  • La réduction de certaines recettes, ce qui va être à nouveau le cas avec la CVAE, après la CFE, la TP, la DGF, ….,
  • Le recours à un critère fondé sur l’autofinancement (“associé à une trajectoire pluriannuelle des recettes”, mais pas des dépenses?).

La taxe d’aménagement est applicable notamment à toutes les opérations d’aménagement, de construction, de reconstruction et d’agrandissement de bâtiments ou d’installations, nécessitant une autorisation d’urbanisme.

L’article L.331-2 du code de l’urbanisme prévoit que la part communale de la taxe d’aménagement est instituée :

  • De plein droit dans les communes dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un plan d’occupation des sols, sauf renonciation expresse dédiée par délibération dans les conditions prévues au neuvième alinéa ;
  • Par délibération du conseil municipal dans les autres communes.

Jusqu’à fin 2021, au huitième alinéa du présent article, tout ou partie de la taxe perçue par la commune pouvait être reversée à l’EPCI ou aux groupements de collectivités dont elle est membre, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de la commune, de leurs compétences, et ce dans les conditions prévues par délibérations concordantes du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’EPCI ou de groupement de collectivités.

Autrement dit, jusqu’en 2021 le reversement de la taxe d’aménagement des communes vers leur EPCI était facultatif. Ce reversement se faisait avec l’accord desdites communes qui devaient délibérer et en fixer les modalités au sein de conventions signées de façon contradictoire avec leur EPCI de rattachement.

Nouvelle version au 1er janvier 2022

L’article 109 de la loi de finances 2022 rend obligatoire le reversement de la taxe d’aménagement entre communes membres et EPCI au prorata des charges de financement des équipements assumés par chaque collectivité. Ainsi, au huitième alinéa de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, les mots « peut être » sont remplacés par le mot « est ».

« Tout ou partie de la taxe perçue par la commune est reversé à l’établissement public de coopération intercommunale ou aux groupements de collectivités dont elle est membre, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de cette commune, de leurs compétences, dans les conditions prévues par délibérations concordantes du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du groupement de collectivités ».

En d’autres termes, la loi de finances 2022 a transformé la possibilité de reverser de la taxe d’aménagement, entre des communes membres et leur EPCI de rattachement, en obligation.

Une motivation pour une justice fiscale et financière :

  • A la fois parce que l’obligation de reversement existe déjà, et de façon obligatoire, dans le sens inverse entre EPCI et commune. En effet, l’article L.331-2 du code de l’urbanisme prévoit que, lorsque la taxe d’aménagement est perçue de plein droit dans les communautés urbaines, les métropoles et la métropole de Lyon, sauf renonciation expresse, ou par délibération de l’organe délibérant dans les autres EPCI compétents en matière de plan local d’urbanisme en lieu et place des communes qu’ils regroupent et avec leur accord, une délibération prévoit les conditions de reversement de tout ou partie de la taxe perçue par l’EPCI à ses communes membres compte tenu de la charge des équipements publics relevant de leurs compétences. Rendre obligatoire le versement de la taxe d’aménagement entre communes et EPCI ne fait donc, en cela, que répondre à une justice fiscale légitime, l’obligation existant déjà dans le sens inverse.
  • Mais aussi parce que, notamment au sein des ZAE qui depuis la loi Notre exclusivement de compétence communautaire (la notion d’intérêt communautaire pour les ZAE ayant été supprimée à compter du 1er janvier 2017) il est admis de tous que la perception par une commune de la taxe d’aménagement versée par les entreprises s’installant sur les ZAE visées alors même que la commune n’a plus à supporter aucun des coûts d’équipement afférents à la viabilisation de ces dernières, constitue une injustice fiscale totale pour l’EPCI compétent (sauf évidemment pour les ZAE entièrement financées par les communes et qui n’auraient été que récemment transférées à leur EPCI de rattachement).

Ces clés de partage et de reversement devront tenir compte de la charge des équipements publics assumée par chaque collectivité concernée eu égard à leurs compétences respectives, par délibération concordante de l’organe délibérant de la commune et de l’intercommunalité. Mais elles pourraient également s’appuyer sur une sectorisation appropriée des taux de taxe d’aménagement appliqués sur le territoire.

La modification des modalités de calcul des critères de péréquation, potentiels fiscaux, financiers, efforts fiscaux, entrera bien en vigueur au 1er janvier 2022.

Si la rédaction issue de la LF 2021 permet d’intégrer le nouveau panier fiscal des communes et EPCI, un point nous interpelle pour le mode de calcul des potentiels fiscaux et financiers des communes, et n’est pas modifié par la rédaction de la loi de finances pour 2021.

En effet, pour la prise en compte de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans le potentiel fiscal et financier, l’article L.2334-4 du code général des collectivités territoriales issue de la loi de finances pour 2021 (donc celui qui entrera en application au 01/01/2022), précise au point I que sont pris en compte les deux produits suivants :

Premier produit FB

« 1° bis Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 multipliée par le coefficient correcteur mentionné au B du IV de l’article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ; ».

Ainsi, le produit de foncier bâti pour le potentiel fiscal est valorisé à hauteur de la somme taux communal et taux départemental reçu en compensation de la suppression de la taxe d’habitation, pondéré par le coefficient correcteur qui vise à ce que le « nouveau » produit de foncier bâti ne soit pas inférieur au produit de taxe d’habitation sur les résidences principales supprimé pour la commune.

Le produit de foncier bâti et d’ex – produit de taxe d’habitation est donc valorisé directement dans le potentiel fiscal, au taux communal, alors que précédemment, taxe d’habitation et taxe sur le foncier bâti étaient valorisés aux taux moyen national.

Second produit FB

1° ter Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la différence entre le taux moyen national communal[1] d’imposition de cette taxe et la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 ; »

Deuxièmement, le premier produit est « corrigé » de la différence entre le taux moyen national de foncier bâti et le « nouveau » taux communal de foncier bâti (avec l’ex-taux départemental). Cette procédure vise à pallier le fait que dans le premier terme, c’est le taux communal qui est pris en compte.

Mais le second produit mesure l’écart entre le taux moyen national de foncier bâti (communal et ex départemental) et le taux « facial » communal (avec l’ex -taux départemental). Or, la commune perçoit un produit et un niveau de richesse pondéré par le coefficient correcteur.

La logique du calcul proposé est claire : le second produit vise à ajouter au premier, l’écart entre le taux moyen national et le « nouveau » taux communal 2020. Toutefois, en n’appliquant pas le coefficient correcteur (ni communal ni moyen national), on introduit un biais et une différence par rapport aux potentiels fiscaux et financiers 2020. Car en moyenne au niveau national, le coefficient correcteur n’est pas égal à 1 : le produit de foncier bâti départemental n’a pas représenté strictement le produit de taxe d’habitation communal supprimé.

Le mode de calcul du potentiel fiscal « foncier bâti » est au terme de ces deux :

Premier produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020) x coefficient correcteur

+ Second produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux moyen national Foncier bâti N-1 – Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020)

Soit, écrit autrement :

Bases brutes communales FB N-1 x [ Taux moyen national Foncier Bâti N-1 + (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental Foncier bâti 2020) x (coefficient correcteur – 1) ]

Le taux moyen national de Foncier bâti est corrigé du supplément ou de la minoration au titre du coefficient correcteur appliqué au taux communal. En moyenne, on a donc le taux moyen national. Mais il eut fallu corriger aussi le taux moyen national du niveau du coefficient correcteur moyen national.

Nos simulations témoignent que les écarts à la moyenne des potentiels fiscaux et financiers de l’ensemble des communes sont impactés avec des variations souvent sensibles. Pour les EPCI, les variations des écarts à la moyenne des potentiels fiscaux sont bien plus modestes.

Notons toutefois, qu’un mécanisme de correction est prévu, afin de lisser dans le temps les effets de cette suppression : les potentiels financiers et fiscaux 2022 seront corrigés d’une fraction permettant de neutraliser les effets de la suppression de la taxe d’habitation (et de la réduction de moitié des valeurs locatives des locaux industriels). Cette fraction sera intégrée en totalité dans les potentiels fiscaux et financiers pour 2022, puis en réduction les années suivantes : 90% en 2023, 80% en 2024, puis -20% par an, jusqu’à une absence de fraction de correction à partir de 2028.

Le mode de calcul précis de ces fractions de corrections, qui doivent neutraliser pour 2022, les écarts, doit être précisé par un décret. Nous ne savons pas pour l’heure comment ils seront calculés.

Espérons qu’au cours de l’année 2022, et malgré l’élection présidentielle, des ajustements puissent être apportés. L’année 2022 permettra au moins de voir précisément l’ampleur de ces fractions de corrections.


[1] L’article 47 de la loi de finances pour 2022 est venue supprimer cette mention, ce qui implique que les taux additionnels de foncier bâti seront à prendre en compte dans le calcul.

Si le projet de loi de finances pour 2022 n’intègre pas de mesures fortes pour les collectivités contrairement aux années précédentes, les efforts d’augmentation des dotations de péréquation sont poursuivies, avec des variables d’ajustement qui n’impacteront que les régions.

Ce projet de loi de finances confirme par ailleurs l’entrée en application des nouvelles modalités de calcul des potentiels fiscaux et financiers, et efforts fiscaux dès 2022, contrairement aux annonces contraintes qui ont fleuri à l’été.

Notons qu’en principe, les effets de la suppression de la taxe d’habitation et de la réduction de moitié des valeurs locatives seront neutralisés pour l’année 2022, par l’application d’une fraction de correction. En principe, car le mode de calcul précis et les objectifs sont renvoyés à un décret à paraître. Ce ne sera qu’à partir de 2023 que la fraction commencera à être réduite, pour être supprimée en 2028.

Comme toujours, nous sommes heureux de vous faire part de nos analyses, en espérant qu’elles vous éclairent.

Retrouvez dans notre note d’analyse les dispositions détaillées du PLF 2022

Comme chaque année, les consultants EXFILO mettent en libre disposition leur note d’analyse du projet de loi de finances pour 2021.

Retrouvez les dispositions commentées :

  • Diminution de moitié des valeurs locatives foncières des établissements industriels et sa compensation
  • Nationalisation de la taxe sur l’électricité
  • Application progressive de l’automatisation du FCTVA
  • Ajustement des potentiels fiscaux et financiers pour 2022 suite à la suppression de la taxe d’habitation
  • La présentation du budget de l’Etat en une section de fonctionnement et d’investissement

L’automatisation du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) conduit à utiliser la nomenclature comptable comme base d’éligibilité, et non plus la nature des dépenses.

Toutefois, cette automatisation présente un coût de mise en œuvre estimé à 235 millions d’euros selon les années du cycle électoral, avec un surcoût moyen de 113M€ par an.

Aussi, l’application de l’automatisation sera progressive : En 2021, seront concernées les collectivités et EPCI qui reçoivent le FCTVA l’année de la réalisation de la dépenses (EPCI à fiscalité propre, communes nouvelles,…). Un bilan sera tiré suite à cette première étape afin de procéder à des ajustements et d’ « identifier les éventuels surcoûts ».

L’exposé des motifs précise ainsi : « Ce surcoût donnera lieu, à l’édiction d’une mesure de correction, par exemple sur l’assiette du FCTVA. […]. Ainsi, avant la généralisation à l’ensemble des régimes, la neutralité budgétaire de la réforme sera assurée. ».

Il semble donc que le coût de l’automatisation du FCTVA sera payé par les collectivité par la réduction des attributions du FCTVA. Il est ainsi à ce titre intéressant de noter le changement de définition du FCTVA engagé par l’article 57 :

Article L.1615-1 CGCT :

                            Rédaction avant l’article 57 PLF 2021 : « Les ressources du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée des collectivités territoriales comprennent les dotations ouvertes chaque année par la loi et destinées à permettre progressivement le remboursement intégral de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d’investissement …»

                            Rédaction issue de l’article 57 PLF 2021 : « Les attributions ouvertes chaque année par la loi à partir des ressources du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée des collectivités territoriales visent à compenser la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d’investissement …»

Cette nouvelle rédaction, qui « troque » l’ancien objectif de compensation intégrale, pour une simple compensation, n’est pas anodine.

Enfin, les fonds de concours versés par des collectivités territoriales et EPCI à une autre collectivité ou EPCI pour des dépenses d’investissement sur leur domaine public routier, ne seront plus éligibles au FCTVA à compter des nouvelles dépenses de l’exercice 2021.

Dans le cadre des annonces du Gouvernement, l’article 4 du projet de loi de finances pour 2021 met en œuvre la réduction de moitié de la valeur locatives des établissements industriels.

Pour mémoire, la méthode d’évaluation de la valeur locative cadastrale dépend du type de local de référence : local d’habitation ou local commercial : comparaison à un local de référence ; locaux appartenant à un établissement industriel : méthode comptable ; immobilier atypique : barème national (pour les autoroutes, installation de production et distribution de gaz, électricité, eau potable, SNCF, radiotélévision, …).

Les établissements industriels correspondent au sens des dispositions de l’article 1499 du code général des impôts, précisé par les jurisprudences successives :

  • Aux usines et ateliers où s’effectuent à l’aide d’un outillage important la transformation des matières premières, la fabrication ou la répartition des objets (fonderie, chaudronnerie, tôlerie, travail du bois,…)
  • Aux établissements où le rôle de l’outillage et de la force motrice est prépondérant (carrières, marchand de gros utilisant notamment des engins de lavage de grande puissance tels que grues, ponts roulants, installations de stockage de grande capacité,…), selon la doctrine administrative (6C 251- à 7).

Ces établissements industriels peuvent relever :

  • du régime micro BIC (les petites entreprises dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 176 200€ pour  les ventes ou 72 500€ pour la prestation de service) : la valeur locative cadastrale de leurs locaux est évaluée selon la méthode par comparaison (comme pour les locaux commerciaux et locaux d’habitation) ;
  • d’une imposition au réel (tous les autres) : la méthode comptable : la valeur locative cadastrale est fixée par l’application au prix de revient inscrit au bilan, d’un taux d’intérêt.

Pour la méthode comptable, le prix de revient (d’acquisition ou de construction) est :

  • Pour les sols et terrains : pondéré par un taux d’intérêt de 8% (pour les biens acquis après le 01/01/1959,
  • Pour les constructions : Pondéré d’un taux d’intérêt de 12% lui-même abattu de 1/3 pour les biens acquis après le 01/01/1976 (1/4 avant cette date). Le taux d’intérêt est donc de 8% (9% pour les biens acquis avant 1976).

L’article 4 du PLF 2021 vient modifier ces taux d’intérêt qui s’appliquent à la valeur d’acquisition pour former la valeur locative cadastrale : pour les terrains, le nouveau taux passera à 4%, et pour les constructions, le nouveaux taux passera à 6% (avant abattement d’1/3 ou d’1/4).

Ainsi, les valeurs locatives cadastrales des établissements industriels seront réduites de moitié (le taux d’intérêt étant lui-même divisé par deux).

Afin de compenser la perte de ressources pour les collectivités locales (point III de l’article 4 du PLF 2021), l’Etat versera une compensation de perte de recettes de taxe foncière sur les propriétés bâties et de perte de recette de cotisation foncière des entreprises, équivalent à la perte de bases d’imposition sur ces établissements industriels multipliés par le taux d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties ou de cotisation foncière des entreprises, de l’année 2020.

Ainsi,

  • Les bases d’imposition des établissements industriels pour la taxe foncières sur les propriétés bâties et la cotisation foncières des entreprises seront réduites de moitié, conduisant à une diminution de moitié de la cotisation des établissements industriels ;
  • L’Etat versera une compensation égale chaque année à la perte de bases résultat chaque année de la réduction de moitié des taux d’intérêt pour le calcul de la valeur locative cadastrale, au taux d’imposition 2020 : la compensation sera donc évolutive, elle progressera (ou diminuera) comme les bases d’imposition des établissements industriels ;
  • Le taux de compensation de TFPB ou de CFE sera celui de 2020. Pour les communes, le taux de TFPB de 2020 sera majoré du taux départemental de foncier bâti de l’année 2020 ;
  • Le coefficient correcteur de taxe foncière sur les propriétés bâties devrait bien être pris en compte, puisque les services fiscaux devront recalculer la perte de recettes, donc les recettes qui auraient été perçues, avec le coefficient correcteur, mais sans la réduction de moitié des valeurs locatives des établissements industriels
  • Les collectivités locales et EPCI perdent par contre leur pouvoir de taux sur la moitié réduite des bases des établissements industriels, c’est-à-dire la compensation.

Par ailleurs, l’Etat compense la moitié de la cotisation des taxes additionnelles (TSE, GEMAPI) des établissements industriels, et modifie les modes de calculs afin de neutraliser tout effet de report de cotisations sur les autres redevables (de même pour la répartition locale de la CVAE nationale en fonction des valeurs locatives des établissements).

L’article 58 du projet de loi de finances pour 2021 acte et organise, la neutralisation des effets de la suppression de la taxe d’habitation et de la réduction de moitié des valeurs locatives des établissements industriels sur les critères de répartition des dotations de péréquation (potentiel fiscal, potentiel financier, effort fiscal, potentiel fiscal agrégé, effort fiscal agrégé).

Si l’on devait en une seule phrase résumer ces dispositions, nous pourrions citer celle-ci de l’article 58 PLF 2021  : « Les indicateurs financiers [potentiels fiscaux, financiers, effort fiscal, potentiel financier agrégé, effort fiscal agrégé] de chaque commune ou ensemble intercommunal sont, chacun, majoré ou minoré d’une fraction de correction visant à égaliser les variations de ces indicateurs liés : … ».

Les conditions précises de calcul seront déterminées par décret en tenant compte de la différence de produits pris en compte pour le calcul des critères en 2021 et 2022 (recettes 2020 et 2021). Schématiquement, il s’agira de recalculer les critères 2021 sur la base des dispositions de 2022, de constater un écart, et d’intégrer cet écart dans le calcul des critères 2022 pour neutraliser l’impact de la suppression de la TH et de la réduction de moitié des bases des établissements industriels.

A noter que la loi prévoit d’ores et déjà, la suppression progressive de ces ajustements : « En 2023, les indicateurs financiers […] seront chacun majorés ou minorés du produit des fractions de correction […] calculées en 2022 par un coefficient de 90%. En 2024, ce coefficient est égal à 80%, puis il diminue de 20 points par an au cours des quatre exercices suivants. ».

Bref, il ne s’agit pas de la refonte attendue des indicateurs, simplement d’un lissage dans le temps des effets. Une réforme a minima en l’état, et qui laisse entièrement ouverte la question des impacts de la suppression TH et de la réduction de moitié des bases des établissements industriels, sur les critères de répartition des collectivités et donc leurs dotations.

Ces modifications sur les indicateurs financiers n’entreront en vigueur qu’en 2022, ce qui laisse encore l’année 2021 pour procéder à des ajustements ou discussions avec l’Etat.

Le Plan « France Relance » a été présenté par le Premier Ministre le jeudi 3 septembre 2020. Il traduit une volonté d’intervenir rapidement et fortement pour soutenir l’activité économique et l’emploi, tout en se plaçant dans la perspective de la transition écologique.

Le Plan cible à la fois des thématiques et des acteurs à mobiliser, au titre desquels figurent les Collectivités locales. Ainsi, la Dotation de Soutien à l’Investissement Local (D.S.I.L.) est bonifiée d’un milliard d’euros supplémentaires, dès 2020. Cette bonification s’ajoute aux deux milliards de dotation initiale.

Pour la mise en œuvre opérationnelle de cette mesure, une circulaire de Madame la Ministre J. GOURAULT aux Préfets de Départements et de Régions, parue au cœur de l’été (le 30 juillet) et non publiée au Journal Officiel apporte quelques précisions quant aux thématiques et aux projets éligibles.

Sans surprise, la programmation s’inscrira en phase avec les dispositifs de contractualisation entre l’Etat et les Collectivités (Contrats de Plan Etat-Région, Contrats de ruralité, Contrats de Ville… et dispositifs thématiques de type Action Cœur de Ville, Territoires d’Industrie,…).

Toutefois, la Circulaire prévoit qu’à défaut de support contractuel préexistant, « le contrat peut prendre la forme d’une simple Convention signée entre les parties ». Le texte précise également « qu’afin de soutenir un effort d’investissement rapide, aucune limitation en montant n’est fixée. Sont donc éligibles les travaux de faible montant comme les investissements de montants plus importants ».

Les thématiques des projets éligibles sont réparties en trois catégories.

  • D’une part, les projets qui soutiennent la transition écologique. On retrouve ici la rénovation énergétique des bâtiments et le développement de nouvelles solutions de transport, mais aussi la réhabilitation des friches industrielles et les réaménagements d’espaces publics pour lutter contre les îlots de chaleur.
  • D’autre part, les projets ayant trait à la résilience sanitaire, pour renforcer la capacité des territoires à faire face aux crises sanitaires. Sont cités les Maisons Pluridisciplinaires de Santé, mais également les travaux sur les réseaux d’assainissement.
  • Enfin, la troisième catégorie de projets ayant vocation à être soutenus par la D.S.I.L., pour favoriser l’attractivité des territoires ruraux (et soutenir le secteur du bâtiment et des travaux publics), concerne la préservation du patrimoine public historique et culturel, classé et non classé.

La diversité des thématiques s’inscrit en synergie avec la volonté du Ministère d’engager rapidement les crédits disponibles, pour un réel effet de levier des dispositions du Plan France Relance sur la reprise économique.

La Circulaire prévoit que les crédits devront être engagés si possible en 2020 et au plus tard le 31 décembre 2021, tout en sollicitant un point d’étape auprès des Préfets de Département et de Région… dès le 15 octobre 2020.

Nul doute que la pression sera forte sur les services déconcentrés de l’Etat dans les semaines et mois à venir pour un engagement des crédits disponibles. Aux Collectivités de s’organiser, sans attendre, pour remonter les projets qui pourraient être éligibles.

L’inflation prévisionnelle pour 2020 est établie à +0,4% contre +1,1% en 2019. Les prix des produit pétroliers contribuent en grand partie à cette modération des prix. Le Gouvernement précise que les aléas sur cette prévision sont importants, et dépendra grandement de la capacité de rebond.

Enfin, le ratio de dette publique atteindrait 121% du PIB.

Le déficit public ressortirait selon le PLFR3 à -11% du PIB. Le solde structurel serait stable à -2,2% comme en 2019, mais le solde conjoncturel sera négatif à hauteur de -7%, et l’impact des mesures ponctuelles et temporaires constitue le solde.

L’évolution des recettes fiscales de l’Etat témoigne de la forte sensibilité de la taxe sur la valeur ajoutée, future recette des intercommunalités et départements suite à la suppression de la taxe d’habitation, à l’activité économique.

Ainsi, la projection de produit de TVA du PLFR3 ressort à 106,2Mds€ contre 129Mds€ en 2019, soit une diminution de 18% à la date de début juin.

Pour le bloc local (communes et EPCI), le PLFR3 met en place un fonds de compensation des pertes de recettes fiscales et domaniales constatées en 2020 par rapport à la moyenne 2017-2019. Ce fonds s’élèvera à 750M€ dont 500M€ dès le PLFR3.

Ce fonds sera complété par un fonds de soutien à l’investissement local doté d’1Mds€. Ce fonds visera à accompagner l’émergence de projets de territoire, et financera prioritairement des projets contribuant à la résilience sanitaire, à la transition écologique ou à la rénovation du patrimoine public bâti et non bâti.

Pour les départements, une avance sur les DMTO, dotée de 2,7Mds€ dont 2Mds€ pour 2020, est constitué. Elle vise à soutenir les départements dont la situation financière rendrait difficilement absorbable la perte de recettes des DMTO : ces avances devront faire l’objet d’une demande des départements. Ces avances feraient l’objet d’une reprise sur les années 2021-2023 sur les douzièmes de fiscalité.

Un fonds pour soutenir les collectivités d’outre-mer qui ont vu fondre les taxes indirectes, vise à compenser les pertes d’Octroi de mer et de taxe spéciale sur la consommation, est doté de 60M€.

Enfin, des dispositions temporaires permettent d’exonérer de taxe de séjour les redevables d’un territoire.